La rénovation énergétique

15 Cas d'études représentatifs

Dans le cadre du projet Syndic Reno Support ont été organisés 10 Laboratoires de la Copropriété, des journées de formation et d'échanges avec plus de 80 syndics professionnels autour de la rénovation énergétique en copropriété et de cas concrets amenés par les participants.

En complément, et parfois à la suite des Laboratoires, une récolte de témoignages individuels détaillés a été réalisée, aboutissant au recensement de copropriétés ayant entamé des projets de rénovation et à la publication de Reno Stories, cas concrets de copropriétés ayant réalisé des travaux de rénovation énergétique.

Des problématiques et schémas récurrents ont été identifiés. Pour les illustrer, nous avons sélectionné 15 cas d’étude détaillés et représentatifs du parc immobilier des copropriétés (Région, âge des bâtiments, nombre de lots).

80% pour lesquels l'énergie n'était pas le principal motif de rénovation

La rénovation énergétique est rarement le principal motif de travaux : sur 15 copropriétés étudiées, seules 3 avaient une motivation purement ou majoritairement énergétique. 6 copropriétés présentaient des problèmes de bâtiment et souhaitaient améliorer leur performance énergétique, tandis que pour 6 autres, l’aspect énergie a été ajouté plus tard, souvent après avoir reçu un conseil ou un accompagnement adapté.

80% des projets de rénovation énergétique… n’avaient donc pas l'amélioration énergétique comme principale ambition.

La plupart des chantiers visent d'abord à résoudre des pathologies du bâtiment, et l’amélioration énergétique n’est souvent qu’un ajout opportuniste.

Or, effectuer certains travaux sans amélioration énergétique complique toute future intervention pendant 15 à 20 ans. Il est donc essentiel de créer les conditions (incitants, rapidité voire dispense de permis, ...) permettant d’intégrer systématiquement une réflexion énergétique lors des rénovations.

8 ans en moyenne par projet

Le processus décisionnel des copropriétés est complexe et lent.

Les assemblées générales, seul moment autorisé de prise de décision, se tiennent généralement une fois par an et l’aboutissement des votes repose sur la concertation entre copropriétaires aux priorités souvent divergentes.

Étant donné les enjeux financiers importants, toute incertitude ou changement règlementaire peut compromettre leurs projets, reporter les votes, et donc la mise en chantier pour plusieurs années.

Dans les cas étudiés, la durée moyenne entre le démarrage des réflexions et le chantier est de 8 ans. Seules 2 copropriétés ont abouti à des travaux en « seulement » 3 ans, principalement grâce à la perspective d’obtenir une proportion significative de primes.

150€ /mois /appartement en moyenne

La  rénovation de la toiture et de la chaudière sont les premières actions les plus fréquentes, la ventilation est la plus rare mais le mix de travaux et leur phasage est différent pour chacune des copropriétés analysées.

Les montants engagés par tranche sont similaires : 86% des copropriétés ont un niveau de contribution individuel entre 100 et 180€/mois par appartement en moyenne.Seulement 2 copropriétés ont réalisé des travaux avec des montants mensuels plus élevés (350 et 550€/mois) liés à des pathologies significatives et pour des appartements à valeur élevés. Bien que l'échantillon soit limité, cet effet est confirmé par l'expérience de nombreux syndics.

Ramener des travaux ambitieux à des mensualités "raisonnables" est un des principaux facteurs de succès montrant le rôle crucial que joue l'offre de crédits et ce, particulièrement pour les très petites (durées) et très grandes (plafonds) copropriétés.

3+ solutions de financement combinées

Le financement de travaux en copropriété reste le principal frein.

Traditionnellement, les copropriétés alimentaient leur fonds de réserve pendant des longues années avant de réaliser les travaux. Aujourd‘hui, les montants en jeu, l’urgence des travaux et les évolutions de prix font que les crédits aux copropriétés se généralisent mais l’offre reste insuffisante (4 organismes prêteurs* seulement offrent ce type de crédit) et souvent inadaptée (durées maximales, plafonds, modalités pratiques) menant à la nécessité de combiner au moins 3 solutions de financement différentes pour 90% des cas analysés.

Le crédit à taux préférentiel est déjà bien développé en Wallonie (taux à 0%). Bien qu’assez récent, ce dispositif s’est très fortement amélioré (ex. récolte automatique des avertissements d’extrait de rôle) et est une aide cruciale pour les copropriétés. Quatre copropriétés de l’échantillon y ont eu recours, dans la limite de 60 000 € par appartement et 500 000 € par copropriété.

À Bruxelles, ce type de dispositif est en phase pilote mais avec des taux nettement plus élevés (entre 3,5 et 5%).

Pour certains copropriétaires, même avec le bon crédit, les coûts de la rénovation restent prohibitifs. Pour au moins deux des copropriétés analysées, une augmentation des ventes a été constatée après le vote des travaux.

*Belfius, BNP Paribas Fortis, KBC/CBC et le Fonds du Logement Wallon

100% réinjectées dans les travaux suivants

La part des primes dans le coût total des travaux varie selon le contexte.

À Bruxelles, pour des rénovations purement énergétiques, elles peuvent représenter jusqu'à 30 % du montant des travaux, mais ce cas est rare et suppose l'absence d'autres urgences. Dès que des réparations structurelles ou d'étanchéité s'ajoutent, la proportion chute souvent à 10 % ou moins. Pourtant, même limitées, les primes restent un incitant particulièrement important à l'isolation. Pour 3 copropriétés, les travaux engagés après plusieurs années d’études sont encore en cours, sans garantie de recevoir les primes espérées.

En Wallonie, avant 2023, les primes devaient être demandées individuellement, rendant difficile l'estimation des montants effectivement reçus.

Que font les copropriétés après réception des primes ? 3 d'entre elles avaient fait appel à un préfinancement des primes et les ont donc remboursées directement. Pour les autres copropriétés ayant reçu les primes de façon commune, elles les ont systématiquement affecté à la suite des travaux.

187 kWh/m²/an d'écart moyen entre les PEB d'un même immeuble

Selon la localisation dans l’immeuble (sous la toiture, au-dessus des caves, au centre…), les surfaces de déperdition varient, ce qui entraîne des certificats PEB privatifs parfois (très) différents.

Actuellement, les objectifs de rénovation (existants ou prévus) sont individuels par appartement, alors que les principaux travaux économiseurs d’énergie doivent être réalisés de façon commune. Les copropriétaires paient donc en fonction de leurs quotités en non de l’impact sur leur PEB (ou encore de leur localisation dans l'immeuble).

Aucune des copropriétés étudiées n’a fait réaliser d’analyse des PEB avant et après travaux, elles n’ont donc pas de garantie que tous les appartements seront conformes aux objectifs bien que les travaux aient été dictés par le bon sens technique et financier global.

70+ réglementations et obligations applicables aux copropriétés

Pour chacune des copropriétés analysées, il y en a probablement de nombreuses autres qui, à partir des mêmes problématiques, ont abouti à des travaux nettement moins ambitieux du point de vue énergétique pour des montants dépensés comparables.

Au moment d’envisager des travaux, face aux nombreuses priorités, l’élément différenciateur est d’avoir le bon conseil et les bonnes informations au bon moment, permettant de regrouper les intérêts ou de fluidifier le processus.

Quelques exemples issus des cas analysés :

• variante isolation incluse par défaut dans l'étude technique,
• grouper les demandes de permis pour les bâtiments d’un complexe,
• détail type commun pour le remplacement privatif des châssis,
• remarques pompiers intégrées au fur et à mesure au projet.

Dans les moments clés, la présence d’architectes ou d’entreprises spécialisés en copropriété et de syndics professionnels et formés ont fait la différence entre des travaux-coûts et des travaux-investissements.

612 agent immobilier syndics en Belgique

Pendant longtemps, dans l'imaginaire collectif, "bon" syndic était un syndic qui ne faisait pas de travaux. Malheureusement, chaque immeuble vieillit et des interventions sont nécessaires pour le maintenir en bon état et maintenir ou améliorer sa valeur. À cela s'ajoute, aujourd’hui la nécessité d'en améliorer les performances énergétiques.

La gestion proactive et pragmatique de ces travaux, leur planification et financement deviennent donc un enjeu de sauvegarde de la valeur patrimoniale, et le syndic, en tant que représentant légal de la copropriété, joue un rôle déterminant. 

La désignation d’un syndic (qu'il soit professionnel ou non-professionnel) est obligatoire, et pourtant moins de 6O% des copropriétés ont un mandat de syndic enregistré à la BCE. Des chiffres qui interpellent quand on pense que ceci est nécessaire pour assurer un bon suivi en cas de changement de copropriétaires et pour bon nombre d'actions officielles.

Face à la complexification constante des règlementations, la question se pose : est-ce que le modèle actuel et le nombre d’acteurs disponibles permettront de faire face aux défis à venir ?